Petit-fils de l’archéologue Paul Aveneau de la Grancière (1862-1942), j’ai hérité, il y a quelques années, d’objets issus des collections de cet aïeul.
Paul Aveneau de la Grancière a fouillé et découvert de nombreux sites en Bretagne, et particulièrement dans le Morbihan.
Par les anecdotes de mon père à propos de son aïeul et la présence de ces objets dans l’univers familial, je me suis fabriqué depuis l’enfance une image fantasmée de cet être singulier, qui a marqué fortement mon imaginaire.
Mesurant actuellement le potentiel créatif logé au creux de cet héritage, je m’engage aujourd’hui dans un nouveau projet au long cours, soutenu par le besoin et la curiosité d’interroger une relation avec cet ancêtre que j’aurais aimé connaître.
Conciliant pratique artistique et investigation familiale, le point de départ de ce projet est :
Partir sur les traces de Paul Aveneau de La Grancière
L’Appel des objets
La première étape consiste à trier, organiser, associer, puis à photographier les différents matériaux en ma possession : objets, socles, étiquettes, archives, lettres.
Très rapidement, est apparu des pièces centrales : des colliers talismans et grains de collier, ou Gougad-patereu. Ces objets ont fait l’objet d’une publication ciblée et approfondie par P. Aveneau : « Les parures préhistoriques et antiques en grains d’enfilage, 1897 ».
Je découvre ainsi que ces colliers Gougad patereu sont associés à une tradition talismanique très ancienne sur le territoire du Morbihan.
J’ai à cœur d’interroger cette tradition, qui pointe finalement la mémoire immatérielle et matérielle du territoire.
Objet populaire à l’origine, le collier talisman accède au XIX s au statut d’objet muséal.
La démarche artistique du projet consiste à créer une réactualisation de cette coutume locale (probablement oubliée) du centre Morbihan, en contournant les codes de l’objet muséal au cours d’une mise en situation de l’objet archéologique dans sa fonction initiale : la protection de l’individu.
À cet effet, j’irai à la rencontre des habitants du territoire pour réaliser des portraits photographiques des habitants, parés du collier préhistorique authentique.
Les témoignages du XIX s à propos de la tradition des Gougad patereu rappelle le mode d’emploi :
« Avant de porter le collier, toujours composé d’un nombre impair de grains soit : 1,3,5,7 ou 9, parfois davantage, le malade a le soin de défaire le collier, et d’enfiler les grains, en plaçant, à dessein, la pierre qui a le plus de vertu au milieu, sur trois fils de chanvre n’ayant encore jamais servi. Après cette opération, il ne manque pas de passer neuf fois le collier, en tournant, dans la flamme du foyer, à l’encontre du soleil ; puis, il le met à son cou, et le garde pendant neuf jours». (P. Aveneau. Les parures préhistoriques, 1897).
Pour réaliser les différents portraits, je pense m’appuyer sur ce rituel de l'époque. L’habitant réalisera son propre collier avec un fil de chanvre neuf, en choisissant parmi des grains de collier originaux, exposés dans une vitrine mise sa disposition.
Puis photographier.
Les photographies sont réalisées à la M.A.P.A de Melrand, sous la direction de Bérengère Lapôtre.
L’accueil de la résidence artistique se situe au Village de L’An Mil, Melrand, sous la direction de Maud Le Clainche.